Politique et Sociétés : ouverte sur le monde et sur sa discipline
Pour cette troisième entrevue, Érudit s’est entretenue avec Politique et Sociétés, “revue générale de science politique dont l’objectif est de diffuser la réflexion et la recherche de langue française provenant tant du Québec que de l’étranger”.
Apparue en 1995, la revue joue un rôle important dans la mise en perspective des faits saillants de l’actualité ainsi que dans l’analyse des enjeux variés que soulève l’organisation de la vie politique. Depuis 2002, Politique et Sociétés est diffusée en libre accès sur la plateforme erudit.org. La revue est actuellement dirigée par Laurence Bherer, professeure au Département de science politique de l’Université de Montréal.
1. Pouvez – vous nous expliquer dans quel contexte la revue Politique et Sociétés est apparue ?
Politique et Sociétés existe depuis 1982. Lors de sa création, la revue, alors nommée Politique, publiait essentiellement des articles concernant la politique québécoise et en particulier les relations de la province avec le gouvernement fédéral. À l’époque, la science politique québécoise était encore très récente et la revue a joué un rôle important pour développer la discipline et pour diffuser des connaissances sur notre société. Cela reste encore aujourd’hui un objectif important même si notre mandat s’est élargi. En 1993, la revue change de nom pour Revue québécoise de science politique, et devient le pendant francophone de la Revue canadienne de science politique. Elle a joué un rôle crucial dans le développement et la consolidation de la science politique québécoise. Depuis 1995, la revue se nomme Politique et Sociétés et s’est ouverte sur le monde et la discipline.
2. Bien qu’accordant une attention particulière à la société québécoise, Politique et Sociétés tend à s’ouvrir au reste du monde sur des domaines de réflexions divers et variés. Comment expliquer cette stratégie ?
Depuis 1995, Politique et Sociétés est maintenant une revue généraliste de science politique qui publie des articles en français, pas seulement sur le Québec, même si le Québec demeure un objet central de nos publications. Notamment, nous veillons à conserver un équilibre pour qu’elle soit le lieu de diffusion de recherches québécoises, canadiennes et internationales. Ainsi la revue n’est plus une revue « provinciale » ou liée à une société particulière, mais jouit d’un lectorat et de contributions qui la positionnent avantageusement sur la scène internationale. Nous cherchons à trouver un équilibre entre articles sur le Québec et le Canada, articles de chercheurs québécois et canadiens sur des thèmes très variés qui ne touchent pas nécessairement le Québec et articles du monde francophone en général, encore là sur des sujets variés.
C’est la seule revue de science politique publiant uniquement des articles en français en Amérique du Nord. Politique et Sociétés est également pluraliste et ouverte à tous les horizons de la discipline. Par comparaison avec d’autres revues existantes publiant dans le domaine de la science politique, Politique et Sociétés occupe une niche particulière qui serait autrement laissée vacante.
Cette stratégie réussit bien puisque dans les dernières années nous avons publié en moyenne 61% d’auteurs en provenance du Canada et 39% d’auteurs venant d’autres pays. Les numéros non-thématiques assurent une publication de travaux de chercheurs et d’étudiants provenant de divers institutions et lieux géographiques et portant sur une diversité de sous-champs de la science politique, alors que les numéros thématiques permettent d’approfondir des questions qui touchent l’ensemble de la communauté des politologues à travers une diversité d’approches et de méthodes.
3. La revue s’attache à valoriser la diffusion de la recherche et de la réflexion scientifique de la langue française. Pourquoi porter une attention à la recherche académique francophone ?
Publier en français est important pour plusieurs raisons. Tout d’abord, cela permet une diffusion auprès de notre société et d’offrir en français des textes qui peuvent être utiles autant pour la recherche, l’enseignement que pour la mobilisation des connaissances. La revue est aussi un lieu de diffusion de recherches qui ont un intérêt certain pour comprendre les sociétés québécoises et canadiennes.
Deuxièmement, les institutions francophones au Québec, au Canada et dans le monde ont un historique important de collaboration de recherche et il est important comme petite société francophone d’y contribuer en offrant aussi des espaces solides et rigoureux de diffusion des recherches. Dans l’espace francophone, le Québec a toujours été un leader dans la défense de la recherche en français et la pérennité d’une revue comme Politique et Sociétés témoigne de cet engagement. Cela n’empêche pas les chercheurs de publier en anglais, mais c’est aussi important d’avoir ce choix de la publication en français. Il y a donc bien moyen de s’inscrire dans des réseaux internationaux de recherche, à la fois en anglais, en français et dans d’autres langues. Ce pluralisme qui est au cœur de la recherche doit être conservé et c’est un peu notre responsabilité de le promouvoir.
4. Politique et Sociétés souhaite contribuer à la mise en perspective des faits saillants de l’actualité ainsi qu’à l’analyse des enjeux variés que soulève l’organisation de la vie politique. L’utilisation des réseaux sociaux tels que Twitter ou encore Youtube semble être des outils de communication privilégiés par la revue. Pouvez – vous nous en dire plus sur ces initiatives ?
Nous avons choisi d’ouvrir un compte Twitter pour la revue de manière à partager notre contenu auprès de la communauté académique largement présente sur ce réseau social, mais aussi non académique afin de permettre la diffusion des connaissances francophones. Twitter nous permet de démontrer la pertinence politique et sociale des recherches que nous publions, généralement ancrées dans l’actualité mondiale et francophone. Cette plateforme dynamise également le partage des articles en sollicitant nos chercheurs et chercheuses, augmentant ainsi notre visibilité auprès de leurs universités et chaires de recherche.
Notre stratégie de diffusion consiste à promouvoir le contenu de chaque nouveau numéro dès sa sortie, en présentant chacun des articles à la fois. Hors période de parution, nous partageons environ 3 articles par semaine en lien avec l’actualité du moment. Twitter nous sert également à solliciter de futurs collaborateurs en y diffusant des appels à textes ou à recensions.
Le volet YouTube s’est construit avec pour objectif de vulgariser les recherches francophones et de dynamiser notre manière de les partager. À chaque numéro, nous enregistrons une vidéo de quelques minutes dans laquelle un auteur est invité à présenter son article de manière simple, concise et accessible. Ce format leur permet une visibilité originale et une plateforme nouvelle pour faire part de leurs recherches à un public varié.
Enfin, avec toujours pour objectif la valorisation de la recherche francophone, nous avons monté un outil d’aide aux plans de cours accessible librement en ligne. Il recense l’entièreté de nos articles originaux depuis 2007, classés en champs et sous-champs de science politique, et vise à faciliter l’intégration des recherches francophones dans les plans de cours universitaires et de Cégep en offrant aux enseignants la possibilité d’y trouver facilement des références scientifiques thématiques. Ce classement est également disponible sur l’outil de gestion bibliographique Zotero.
5. Auriez – vous des suggestions d’articles à consulter sur Politique et Sociétés traduisant la diffusion des connaissances sur les phénomènes politiques tout en valorisant la recherche et l’enseignement francophone ?
Au sujet de la recherche francophone, nous avons un numéro entier consacré aux enjeux et défis de la science politique belge, québécoise et française. Il fait état des trajectoires de la discipline, et porte un regard critique sur ses tendances, ses écoles de pensée et ses modes de fonctionnement, en lien avec les enjeux contemporains de l’enseignement et de la recherche.
→Volume 31, numéro 3, 2012. La science politique francophone. Défis et trajectoires. Sous la direction de Carolle Simard et Jérémie Cornut. https://www.erudit.org/fr/revues/ps/2012-v31-n3-ps0514/
De nombreuses recherches que nous publions portent également sur des phénomènes politiques du monde francophone. On peut penser par exemple à l’article de David Paternotte et Bruno Perreau qui propose une réflexion sur l’étude de la sexualité dans la recherche francophone.
→ Paternotte, David et Bruno Perreau. « Sexualité et politique en francophonie : état des lieux et perspectives de recherche. » Politique et Sociétés, volume 31, numéro 2, 2012, p. 3–30. https://doi.org/10.7202/1014349ar
Plus récemment, notre numéro thématique sur les partis indépendantistes, dirigé par Pascale Dufour et Éric Montigny, a mis en lumière l’évolution du monde politique québécois dans un contexte plus large de transformations sociétales et sociales.