Érudit appuie l’initiative Thèsez-vous?, une association étudiante originale qui offre un soutien aux étudiants et étudiantes dans leur rédaction de mémoire ou de thèse en proposant des retraites de travail intensif.
Une Bourse Érudit était ainsi offerte à un·e étudiant·e inscrit·e à un programme en sciences humaines ou sociales. Pour obtenir cette bourse, les candidat.e.s étaient invité.e.s à soumettre un court texte inspiré du thème «À l’ère de Twitter et de ses 140 caractères, pourquoi se lancer dans la rédaction d’un mémoire ou d’une thèse?».
Nous sommes heureux de publier le texte de Marie Jocya Paviel, qui obtient la Bourse Érudit de l’édition de mars 2016 de Thèsez-vous :
« À l’aube du XXIème siècle, notre société n’a jamais été si convaincue par l’idée que « Monsieur, Madame Tout le Monde » a un accès infini à de nombreux savoirs et connaissances. Plus encore, nous ne doutons plus que tout un chacun participe à la construction de ces savoirs, notamment grâce à l’avènement des réseaux sociaux, un des plus grands bouleversements depuis la révolution industrielle. Peut-on pour autant qualifier cette révolution d’intellectuelle ? Les sociologues et les philosophes ont fort à discuter sur la question.
Dans ce contexte, une seconde question se pose : Quelle place doit-on accorder aux mécanismes de construction et de transmission des connaissances quand il ne suffit que d’un « clic » pour rédiger ou transférer une information? Les connaissances sont désormais compilées, voire marchandées, alors que des réseaux sociaux comme Twitter rende un auteur incontournable dès lors qu’il cumule plus de 100 followers pour la modique somme de 140 caractères.
Si autrefois, la connaissance appartenait aux seuls érudits, elle devient aujourd’hui accessible, mais souvent réduite telle une peau de chagrin… revers d’une médaille peu reluisante d’une société dite (sur)informée.
Dès lors, se lancer dans la rédaction d’un mémoire, d’une thèse, d’un article littéraire, philosophique ou scientifique s’apparente à un acte de résistance face à cette paupérisation du savoir. Explorer l’inexploré, comprendre les phénomènes qui nous entourent, remettre en question, douter, réfuter des faits établis comme le préconisait l’illustre philosophe des sciences Karl Popper, tout cela nécessite un cadre spatiotemporel qui dépasse largement celui des réseaux sociaux.
Rédiger est un acte créateur et créatif, que toute personne intéressée à comprendre le monde peut réaliser. Néanmoins, participer à la construction des connaissances est un processus qui prend du temps, plus qu’un simple « clic ». Et surtout, il implique réflexion et jugement critique.
Non pas que les réseaux sociaux soient dénués d’intérêt – accordons-leur le mérite de repousser les frontières et de connecter notre monde – mais force est de reconnaitre qu’ils alimentent une certaine uniformisation des savoirs. Cela va à l’encontre de l’idée de Progrès telle que portée par les philosophes des Lumières qui rappellent la nécessité d’adopter une approche réflexive afin de mieux comprendre et appréhender le monde qui nous entoure.
Alors à nos crayons, à nos claviers, et « thèsons-nous » ! »
À propos de l’auteure
Après une première carrière dans un champ lié aux télécommunications au sein d’une compagnie privée, Marie Jocya Paviel réalise en 2008 un retour aux études. Elle obtient un baccalauréat en psychologie, puis un DESS en intervention comportementale auprès des personnes ayant un trouble du spectre de l’autisme (TSA). Elle poursuit ensuite ses études à la maitrise en éducation à l’Université du Québec à Montréal (UQAM).
L’objet de son mémoire porte sur le sentiment d’efficacité personnelle des enseignant.e.s du primaire qui oeuvrent auprès des élèves ayant un TSA. Elle souhaite ainsi soutenir la pratique enseignante auprès de cette clientèle et contribuer à l’avancement des connaissances en ce sens. Parallèlement, Marie Jocya Paviel est chargée de cours à la Faculté des sciences de l’éducation de l’UQAM. Elle est également maman de deux jeunes adultes qui poursuivent actuellement leurs études au collégial.